Chaque année arrive environ entre 50 000 et 60 000 demandeurs d’asile en France. En 2017, les femmes représentent 35%. Les raisons de leur départ sont multiples et reprennent dans un premier temps celles de la plupart des migrants masculins. Mais nous retrouvons des thématiques qui leur sont bien particulières : les mariages forcés, violences sexuelles, violences/pressions conjugales et familiales, mutilations sexuelles telles que l’excision qui engendre de graves conséquences sur la santé jusqu’à parfois la mort, perte de leur droit : avortement, droit du travail, droit à la liberté de circulation, liberté ou même possibilité d’expression, consentement, droit de vote et j’en passe…
Avant d’arriver en France leur parcours est semé de quelques minimes embûches. Elles partent de leur pays, puis cette fameuse « route de migration » où elles doivent payer de leur corps de leur vie pour passer des frontières, en groupe : 7 hommes pour 3 femmes qui sont considéré comme des objets, des possessions ou des réservoirs je m’abstiens de vous faire part des conditions dans lesquelles elles cheminent en espérant la liberté à leur arrivée.
Mais que leur offre la France ? aux frontières : une zone d’attente, les conditions y sont optimales : une poignée d’hébergement à leur disposition pour des centaines d’arrivants, une assistance médicale si possible, et bien sûr pour ce qui est de leur droits : une permanence téléphonique est proposée ! Ensuite, la préfecture étudie les dossiers leur accordant un titre pour rester ou pas. Et les femmes dans tout ça où sont-elles ? Cacher derrière leurs maris, non-prises en compte car elles ne parlent souvent ni anglais, ni français.
"Il arrive que lors d’entretiens, les femmes viennent avec leur mari et que ce dernier parle à leur place. Parfois, ils viennent même aux rendez-vous de leur femme sans que celle-ci ne soit présente" Accéder à leur récit est une chose très difficile, il y a toujours un filtre qui minimise ou rend inaudible leurs expériences traumatisantes. Les autorités et les professionnels ne sont pas formés aux violences de genre, ainsi elles sont dans des conditions pas suffisamment attentives et rassurantes pour se livrer et souvent elles se découragent car en face le terme de « violences » renvoie à une généralité banalisée.
Rapport de France Terre d’Asile de Mai : "surexposées à des situations de violence" dues "aux conditions d’accueil souvent, inadéquates ou précaires, à leurs conditions de précarité administrative et économique (…) mais aussi à des difficultés d’adaptation au pays de refuge"
France … pays a l’administration splendide ! Eh oui vous avez dit mariage forcé ? mais … prouvez-le. Pour que cela soit pris en compte comme facteur de danger pour accorder l’asile il faut que le pays de la migrante n’accorde pas le consentement et que cela soit reconnu institutionnellement. Dans ce cas c’est le pays qui est en tors, mais si le mariage est forcé dans un cadre familial où la pression peut aller de l’enfermement au meurtre, et qu’il suffit à la femme de porter plainte dans son pays qui bien sûre va la mettre en sécurité, cela ne regarde pas la France, donc retour case départ. Néanmoins … dans la réalité des faits prouver et justifier avec des preuves, des témoignages de proches qui vous ont chassé, répudié, bannis, oublié par honte de votre fuite, dans une langue étrangère, dans un état psychologique déplorable, et avec une écoute remplie de préjugées cela semble bien improbable.
Comme si cela n’était pas suffisant, on demande un « certificat de non-excision » aux femmes qui jugent être exposées aux risques. Une fillette ou une jeune femme doit après tout ce joli voyage, recevoir un examen gynécologique que l’on espère bienveillant, pour prouver qu’elle n’a pas déjà subi une mutilation. Et si c’est le cas, et bien trop tard, ça ne sert plus à rien le risque est déjà fait. Retour. Certificat évidemment à renouveler chaque année, et sans prise en compte thérapeutique. Chose qui a été jugé comme « contraire à la non-malfaisance des gestes médicaux ». Il ne faudrait quand même pas qu’elles nous mentent donc on a besoin de preuves coûte que coûte. Quitte à faire du chantage à l’asile.
En France elles sont la plupart du temps employé de maison, travaillant dans le domaine sanitaire et social pour celles qui s’en sortent. Et pour les autres, c’est la rue sans domicile ou sur le trottoir, forcé à vendre leur corps pour manger, pour leurs enfants. Leur corps comme monnaie d’échange contre un hébergement, comme moyen de pression, comme seule issue. Rappelons qu’au niveau international le commerce sexuel et l’exploitation des migrantes clandestines représentent le 3e revenu illicite après les armes et la drogues. Les proxénètes vont jusque dans les hébergements sociaux pour les chercher, les menacer, leur faire croire qu’elles sont redevables.
Chiffre affolant : 30% des migrantes africaines attrapent le VIH-SIDA une fois arrivée en France à cause de leur précarité sanitaire renforcé par les transactions et les violences sexuelles sur le sol français. Une africaine migrante séropositive en France a été en moyenne 4x plus violé que les autres.
Pour aller plus loin :
Voici un témoignage d’une soignante bénévole à Calais, recueilli par le journal Le Monde à propos d’une Erythréenne de 25 ans :
« Elle avait passé la nuit dehors et paniquait à l’idée d’en passer une seconde, car des hommes avaient voulu l’emmener de force dans leur tente. Nous avons appelé le centre Jules-Ferry. Qui l’a inscrite en position 56 sur la liste d’attente. Nous nous sommes vus lui donner un duvet et lui trouver un petit coin dans la tente d’une autre Erythréenne. Le lendemain, on l’a trouvée en pleurs. On saura seulement que le mari de l’autre femme était revenu ivre dans la nuit. Elle gardera pour elle les détails. Et nous notre honte de ne pas l’avoir mise à l’abri. »
Nouvelle graphique en ligne :
Source
Europe solidaire sans frontières ; Comede ; Offra ; France Terre d’asile ; Planning familial
-Ecrit par Romane Faure- (+chronique sur Radio Campus Tours ‘Ménage-toi Simone’ 19/01/19)
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